21/11/2024

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Entre l’Algérie et la France, des relations en dents de scie

Chadli Mitterand

AFP- Entre coups de froid et gestes d’apaisement, comme la dénonciation samedi par Emmanuel Macron des “crimes inexcusables” commis le 17 octobre 1961, la France et l’Algérie entretiennent des relations complexes, hantées par le passé.

– Indépendance –

Le 5 juillet 1962, l’Algérie proclame son indépendance après 132 ans de colonisation française et une guerre de libération sanglante de près de huit ans.

Le 18 mars, des représentants français et du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) avaient signé les accords d’Evian, consacrant la défaite française.

Le conflit a fait quelque 500.000 morts civils et militaires, dont 400.000 Algériens selon des estimations d’historiens français, 1,5 million de morts selon les autorités algériennes.

En septembre 1963, Ahmed Ben Bella, secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), devient le premier président de l’Algérie indépendante. Moins d’un mois plus tard, il proclame la nationalisation des terres appartenant encore aux Européens.

Les bases françaises de Reggane, Colomb-Béchar et Mers-el-Kebir puis de Bousfer sont évacuées entre 1967 et 1970.

– Nationalisation des hydrocarbures –

En juin 1965, Ben Bella est renversé par son vice-président et ministre de la Défense Houari Boumédiène qui l’avait aidé à prendre le pouvoir lors de luttes de clans à l’indépendance.

En février 1971, Boumédiène annonce la nationalisation des gazoducs comme celle de 51% des avoirs des sociétés pétrolières françaises.

Paris décrète, en avril 1971, la fin des “relations privilégiées” avec l’Algérie.

– Giscard en Algérie –

En avril 1975, Valéry Giscard d’Estaing entame la première visite officielle d’un président français dans l’Algérie indépendante.

Pour la première fois depuis l’été 1962, des drapeaux français ornent les grandes artères d’Alger.

En novembre 1981, François Mitterrand affirme, à son arrivée à Alger pour une visite officielle, que “la France et l’Algérie sont capables de surmonter et de dépasser les déchirements du passé”.

Un an plus tard, Chadli Bendjedid effectue la première visite d’un chef d’Etat algérien en France.

– Violences islamistes –

En 1993, deux géomètres français sont enlevés et égorgés, premières victimes étrangères depuis le début des affrontements entre forces de l’ordre et groupes armés islamistes, en 1992.

En 1994, le Groupe islamique armé (GIA) détourne un Airbus d’Air France sur le tarmac de l’aéroport d’Alger. La prise d’otage se termine à Marseille avec la mort des quatre membres du commando. En représailles, quatre Pères Blancs, dont trois Français, sont assassinés à l’est d’Alger.

En 1996, sept moines trappistes sont enlevés dans leur monastère de Tibhirine, puis assassinés, un acte dont les circonstances exactes restent mystérieuses.

De juillet à octobre 1995, une vague d’attentats du GIA en France fait dix morts et près de 200 blessés.

– Relations ternies –

En 2000, Abdelaziz Bouteflika effectue une visite d’Etat en France.

En 2003, Jacques Chirac signe à Alger avec M. Bouteflika la “Déclaration d’Alger” prévoyant un “partenariat d’exception” afin de dépasser un “passé encore douloureux” qu’on ne doit “ni oublier ni renier”.

Mais en 2005, la promulgation d’une loi sur le “rôle positif de la colonisation” ternit les relations entre Alger et Paris. M. Bouteflika déclare que cette loi révèle “une cécité mentale confinant au négationnisme et au révisionnisme”.

Un an plus tard, l’article controversé de la loi est abrogé par décret.

Mais Alger pose comme préalable à la signature d’un traité d’amitié des excuses officielles pour les crimes commis sous la colonisation.

Fin 2007, Nicolas Sarkozy dénonce à Alger le système colonial sans présenter d’excuses et appelle l’Algérie à se “tourner vers l’avenir”.

Fin 2012, François Hollande, en visite d’Etat, reconnaît solennellement les “souffrances que la colonisation française” a infligées au peuple algérien.

– Nouvelles brouilles –

En mai-juin 2020, l’ambassadeur d’Algérie à Paris est rappelé après la diffusion de documentaires télévisés sur le “Hirak”, mouvement de contestation antirégime.

En janvier 2021, après la publication d’un rapport de l’historien français Benjamin Stora, la présidence française annonce qu’Emmanuel Macron va prendre des “actes symboliques” pour apaiser les mémoires sur la guerre d’Algérie et tenter de réconcilier les deux pays mais qu’il ne présentera pas les “excuses” demandées par Alger.

Alger rejette le rapport, reprochant l’absence de “reconnaissance officielle par la France des crimes de guerre et contre l’humanité perpétrés pendant les 130 années de l’occupation de l’Algérie”.

En avril, une visite du Premier ministre français Jean Castex est reportée au dernier moment.

Le 2 octobre, Alger rappelle son ambassadeur à Paris, en réaction à des propos relayés par le journal Le Monde dans lesquels le président français affirme que l’Algérie, après son indépendance, s’est construite sur “une rente mémorielle”, entretenue par “le système politico-militaire” et questionne l’existence d’une “nation algérienne” avant la colonisation.

Le 5, Emmanuel Macron loue ses bonnes relations avec son homologue Abdelmadjid Tebboune et souhaite trouver une voie d'”apaisement”.

Celui-ci exige de Paris “un respect total de l’Etat algérien”.

– Macron dénonce des “crimes inexcusables” –

Le 16 octobre, Emmanuel Macron dénonce des “crimes inexcusables pour la République” à l’issue d’une cérémonie officielle pour les 60 ans du massacre de manifestants algériens le 17 octobre 1961 à Paris.