21/11/2024

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Sahara occidental : Aminatou Haidar, prix Nobel Alternatif 2019, dénonce “une répression féroce au quotidien du Makhzen

AFP- Aminatou Haidar, militante sahraouie de 52 ans, a reçu le 4 décembre 2019 à Stockholm le Prix Right Livelihood, également appelé Prix Nobel Alternatif, l’un des prix les plus prestigieux dans le domaine des droits de l’Homme. Elle avoue aujourd’hui craindre que la jeunesse dans cette région disputée ait perdu l’espoir de parvenir à l’autodétermination par la non-violence.

“La communauté internationale doit agir sans perdre de temps, parce que les jeunes n’ont plus de patience. Ils ne croient plus à la résistance pacifique”, a dit Aminatou Haidar dans une interview à l’AFP à Genève la semaine dernière.

Une responsabilité de l’Europe “pour éviter la guerre”
L’activiste, surnommée la “Gandhi du Sahara occidental”, a affirmé que les Nations unies, l’Europe – en particulier la France et l’Espagne –, avaient une responsabilité pour “éviter la guerre” dans la région.

Etendue désertique de 266 000 km², riche en phosphates et bordée d’eaux poissonneuses, le Sahara occidental a été annexé par le Maroc en 1975, après le retrait de l’Espagne, jusqu’alors puissance coloniale. Ce coup de force a déclenché une guerre avec le Front Polisario, mouvement indépendantiste soutenu par l’Algérie qui a duré jusqu’au cessez-le-feu décrété en 1991.

L’ONU avait déployé une mission de Casques bleus pour observer la trêve et préparer un référendum sur l’indépendance du territoire, qui n’a jamais pu être organisé. L’ONU continue malgré tout de maintenir sur place 240 membres de la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (Minurso).

Après une longue interruption, le dialogue sous l’égide de l’ONU entre le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie a repris lors d’une table ronde en Suisse en décembre 2018, suivie d’une deuxième en mars 2019, sans qu’aucune percée ne soit enregistrée.

Rabat considère le Sahara occidental comme partie intégrante du royaume et a clairement affirmé qu’il ne tolèrerait aucun changement de statut au-delà d’une simple autonomie.

Inquiète du désespoir des jeunes
Aminatou Haidar a regretté qu’après tant d’années, les revendications non-violentes du peuple sahraoui pour la justice, la dignité et l’autodétermination aient été ignorées par le Maroc et la communauté internationale.

Elle s’est notamment déclarée inquiète par le désespoir des jeunes. “Ils n’y croient plus. Ils disent que la communauté internationale n’agit que dans les conflits où il y a du sang, là où il y a de la violence”, a-t-elle déploré, ajoutant qu’ils “essaient de faire pression sur le Front Polisario pour qu’il reprenne les armes”.

La militante reproche à la communauté internationale de ne pas faire appliquer les résolutions de l’ONU et les décisions de justice en faveur du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.

“C’est à cause de la complicité de quelques puissances internationales”, a-t-elle dénoncé, en ciblant principalement l’Espagne et la France. “Sans l’appui de l’Europe, le Maroc ne peut pas piller, exploiter les ressources naturelles. Il ne peut pas continuer aussi son occupation et nier toutes les résolutions du Conseil de sécurité.”

Fière d’être comparée à Gandhi
Aminatou Haidar, qui se dit fière d’être comparée à Gandhi, continue à prêcher la non-violence, malgré les mauvais traitements et les périodes d’emprisonnement qu’elles a connus depuis sa jeunesse. A tout juste 20 ans, elle affirme avoir été détenue à l’isolement pendant 4 ans dans une prison secrète.

De nouveau emprisonnée en 2005 à la suite d’une manifestation violemment réprimée, elle avait été libérée un an plus tard grâce à la pression des Etats-Unis et autorisée à se rendre en Espagne. Elle avait alors entamé une tournée en Europe, aux Etats-Unis et en Amérique latine, où elle s’était vue décerner plusieurs prix dans le domaine des droits de l’Homme.

Mais en 2009, les autorités marocaines avaient refusé de la laisser revenir dans le royaume et l’avait déportée aux Canaries après lui avoir confisqué son passeport. Elle avait alors observé une grève de la faim pendant un mois, largement médiatisée, qui avait contraint Rabat à l’autoriser à rentrer.

“Mon cas n’est pas unique”, a souligné la militante. “C’est le cas de tout le peuple sahraoui aujourd’hui. Nous nous trouvons dans un territoire où la répression au quotidien est féroce”.