France

La Corse reconnaît l’État de Palestine : entre tradition autonomiste et message diplomatique fort

Ce vendredi 27 juin, l’Assemblée de Corse a franchi un pas politique et symbolique en adoptant une résolution affirmant son soutien à la reconnaissance de l’État palestinien. Une décision portée par la présidente de l’assemblée, Marie-Antoinette Maupertuis, et qui s’inscrit dans la continuité du positionnement historique du nationalisme corse, tout en restant compatible avec la doctrine française sur la solution à deux États.

Une démarche ancrée dans la tradition autonomiste corse

L’Assemblée de Corse, dominée par les élus autonomistes, a adopté un texte intitulé : « Soutien au peuple palestinien et violations du droit international par l’État israélien dans la bande de Gaza ». Ce vote souligne une constante dans la culture politique de l’île : la solidarité avec les peuples en lutte pour leur autodétermination. Le nationalisme corse, depuis des décennies, a exprimé un soutien au peuple palestinien, en écho à ses propres revendications historiques.

La présidente Maupertuis a présenté la résolution comme une réponse morale et politique aux événements en cours à Gaza. Elle y affirme la reconnaissance « de l’existence de l’État de Palestine, conformément aux dispositions antérieures de l’ONU » et appelle à « la mise en œuvre urgente d’une solution politique fondée sur la coexistence de deux États souverains ».

Un positionnement compatible avec la diplomatie française

Si cette initiative est avant tout locale, elle rejoint la position officielle de la France : un règlement du conflit par la voie de la coexistence de deux États. Toutefois, le texte adopté va plus loin, en pressant Paris « de reconnaître à son tour l’État de Palestine sans délai ». L’Assemblée de Corse exhorte également à suspendre « toute livraison d’armes, de munitions ou de matériel militaire à l’État d’Israël tant que celui-ci poursuit ses opérations contraires au droit international ».

Ce geste intervient alors que le président Emmanuel Macron semble temporiser sur le sujet. Le chef de l’État avait en effet envisagé une initiative diplomatique autour de la reconnaissance de la Palestine, mais les équilibres politiques internationaux l’ont contraint à reporter son action. La résolution corse, bien que sans portée juridique nationale, s’inscrit donc comme un acte politique fort dans le contexte diplomatique français.

Réactions contrastées sur la scène politique française

La France insoumise a salué la résolution de l’Assemblée de Corse. Plusieurs députés LFI, dont Ugo Bernalicis, Thomas Portes et Éric Coquerel, y ont vu « un signal fort aux autres territoires et à l’État français ». Pour eux, l’île de Beauté envoie un message courageux, que d’autres institutions devraient suivre.

À l’opposé, les milieux de l’extrême droite identitaire ont dénoncé cette initiative. Nicolas Battini, président de Mossa Palatina, mouvement ultranationaliste corse, l’a qualifiée « d’acte de soumission à l’islamo-gauchisme ». Une déclaration en rupture avec la tradition indépendantiste corse, historiquement proche de la cause palestinienne. Cette réaction souligne les divisions internes au sein du nationalisme corse, entre une ligne identitaire radicale et une tendance plus internationaliste fidèle à ses racines.

Un précédent parlementaire en 2014 à Paris

La Corse n’est pas la première institution française à se positionner ainsi. En décembre 2014, l’Assemblée nationale avait adopté une résolution invitant le gouvernement français à reconnaître officiellement l’État de Palestine. Si cette décision n’avait pas été suivie d’effets concrets, elle avait marqué une volonté politique claire de la part d’une majorité de députés.

Dans ce contexte, le vote corse du 27 juin s’inscrit dans une lignée parlementaire, tout en ravivant un débat qui demeure sensible en France. Il relance aussi la question du rôle des collectivités territoriales dans les prises de position internationales, en période de tensions mondiales accrues.


En résumé, la reconnaissance de l’État de Palestine par l’Assemblée de Corse témoigne à la fois d’un ancrage politique local fort et d’un désir de peser, symboliquement, dans le débat diplomatique international. Une initiative locale qui transcende les frontières de l’île, et qui pourrait bien inspirer d’autres collectivités en France.

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