Crise diplomatique au Sahel : le Mali, le Niger et le Burkina Faso rappellent leurs ambassadeurs en Algérie
Le climat politique et sécuritaire dans la région du Sahel connaît une nouvelle dégradation. Le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont annoncé ce dimanche 6 avril le rappel de leurs ambassadeurs en poste à Alger. Cette décision fait suite à l’accusation portée contre l’Algérie d’avoir abattu un drone militaire malien à la fin du mois de mars dernier, près de la frontière commune.
Une affaire de drone au cœur des tensions
L’origine de cette crise remonte à l’annonce du ministère algérien de la Défense, en début de mois, affirmant que les forces armées avaient abattu un drone armé ayant violé l’espace aérien national, à proximité de la localité frontalière de Tinzaouten. L’Algérie a qualifié cet incident de grave atteinte à sa souveraineté.
De son côté, l’armée malienne avait d’abord reconnu la perte d’un de ses drones, expliquant qu’il effectuait une mission de surveillance de routine. Mais quelques jours plus tard, le ton a changé. Le ministère malien des Affaires étrangères a déclaré que l’appareil avait été ciblé par un « acte hostile », attribuant formellement la responsabilité à l’Algérie à l’issue d’une enquête interne.
Une réponse coordonnée : retrait des ambassadeurs
Dans un communiqué conjoint publié par les chefs d’État du Groupe des États du Sahel (AES), les trois pays ont annoncé le rappel « pour consultation » de leurs ambassadeurs respectifs en Algérie. Une mesure diplomatique forte, traduisant un refroidissement des relations avec Alger, acteur clé dans les dynamiques sécuritaires régionales.
Parallèlement, le Mali a également déclaré son retrait de la commission d’état-major conjoint avec l’Algérie, structure qui coordonnait auparavant les efforts militaires transfrontaliers dans la région.
Des relations déjà fragilisées
Ces tensions interviennent dans un contexte régional tendu. Depuis les coups d’État militaires qui ont porté au pouvoir des régimes de transition au Mali, au Burkina Faso et au Niger, les rapports avec Alger – historiquement attachée à la stabilité régionale – se sont progressivement tendus. L’alignement récent de ces pays avec de nouveaux partenaires internationaux, notamment la Russie, et leur volonté de s’affranchir des anciennes alliances (notamment avec la France), ont accentué les divergences avec l’Algérie.
Le drone malien abattu représente donc plus qu’un simple incident militaire. Il cristallise les suspicions, les rivalités géopolitiques et l’effritement de la coopération régionale en matière de sécurité.
Quelles conséquences pour la stabilité du Sahel ?
Jusqu’à présent, Alger n’a pas réagi officiellement à la décision des trois pays. Toutefois, les observateurs s’inquiètent des répercussions possibles sur la lutte contre les groupes armés présents dans la bande sahélo-saharienne. La fin de la coopération entre l’Algérie et les membres de l’AES pourrait créer un vide sécuritaire aux frontières, au profit des organisations jihadistes qui profitent déjà de la faiblesse des États dans ces zones.
Sans médiation régionale ou internationale, le risque d’un isolement croissant de l’Algérie vis-à-vis de ses voisins sahéliens est réel. Cette crise pourrait également reconfigurer les alliances dans une région déjà marquée par l’instabilité politique, la pauvreté et les conflits.
Alors que le Sahel fait face à des défis multiples, la rupture du dialogue entre Alger et ses partenaires du sud constitue un signal alarmant pour l’avenir de la coopération sécuritaire et diplomatique dans cette zone stratégique du continent africain.
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