21/11/2024

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Aigle Azur : La plus algérienne des compagnies françaises en cessation de paiement

AFP – La compagnie aérienne française Aigle Azur, spécialiste des liaisons vers l’Algérie, s’est déclarée lundi en cessation de paiement et a demandé son placement en redressement judiciaire dans l’espoir de trouver des repreneurs.

“Aigle Azur se retrouve en cessation de paiement suite à plusieurs années d’errance liées à de nombreuses décisions stratégiques inadaptées et doit se placer sous la protection du tribunal de commerce” d’Evry où une audience est prévue dans l’après-midi, affirment les membres du CE à l’issue d’un comité d’entreprise extraordinaire.

Cette décision lui permet à ce stade de maintenir son activité, une semaine après un spectaculaire coup de force d’un actionnaire, Gérard Houa.

“Il est probable que la date limite de dépôt des offres soit fixée autour du 15 septembre 2019”, ajoutent-ils, déplorant que “ce dépôt de bilan arrive tardivement (…) et va limiter la recherche de repreneurs”.

“Plusieurs repreneurs potentiels” ont cependant exprimé un intérêt, selon eux. Parmi eux se trouvent Gérard Houa, Air France ou encore Lionel Guérin, ancien directeur général délégué d’Air France, a-t-on affirmé de sources syndicales.

Aigle Azur compte 1.150 salariés, dont 350 en Algérie.

Une soixantaine de salariés inquiets pour leur avenir se sont rassemblés dans le calme pendant le CE devant le siège de l’entreprise situé près de l’aéroport parisien d’Orly pour faire part de leur “perte de confiance totale” dans le Pdg Frantz Yvelin, a constaté un journaliste de l’AFP.

“On espère surtout qu’il y ait un repreneur. Il faut passer par le redressement judiciaire, simplement pour avoir nos salaires”, explique, fataliste, Lilas, une programmatrice de vols qui n’a pas voulu donner son nom. “Ce serait dommage de perdre une compagnie qui fait 300 millions d’euros de chiffre d’affaires et a des droits de trafic vers l’Algérie que même Air France n’a pas”.

“La déclaration de cessation de paiement a été faite par l’administratrice provisoire”, Hélène Bourbouloux, a précisé à l’AFP Martin Surzur, président du syndicat de pilotes SNPL d’Aigle Azur et membre du CE.

– “Situation catastrophique” –

Mme Bourbouloux avait été désignée administratrice provisoire le 28 août par le tribunal de commerce d’Evry après le coup de force de l’un des actionnaires, Gérard Houa, qui avait évincé le patron Frantz Yvelin en disant sa volonté de mettre fin aux “errements stratégiques des deux dernières années”.

Frantz Yvelin a depuis été rétabli dans ses fonctions pour assister l’administratrice provisoire. Il n’a pas assisté au comité d’entreprise lundi, selon les participants.

“Les actionnaires et Frantz Yvelin sont arrivés en deux ans à une situation catastrophique avec 40 millions d’euros de pertes et la perspective du dépôt de bilan”, a estimé Martin Surzur.

Le projet de M. Yvelin de céder à la low-cost Vueling les précieux créneaux d’atterrissage d’Aigle Azur à Orly pour permettre la survie de la compagnie est unanimement dénoncé par les salariés. “Ca signifie l’arrêt de mort d’Aigle Azur, c’est une fausse bonne solution”, selon Henry Bénéat, commandant de bord SNPL, dans la compagnie depuis 30 ans.

Dans un entretien au Journal du Dimanche, M. Houa, qui contrôle 20% d’Aigle Azur via sa société Lu Azur, a assuré qu’il était soutenu dans sa démarche par les deux autres actionnaires, le groupe chinois HNA (48%) et l’homme d’affaires américain David Neeleman (32%).

Réitérant sa proposition d’investir 15 millions d’euros pour renflouer l’entreprise et acheter les parts de M. Neeleman, il l’a assortie de la condition de mettre en place “un nouveau management”.

Pourtant, dans un courrier électronique que l’AFP avait pu consulter le 26 août, M. Neeleman s’est désolidarisé de l’initiative et avait affirmé que HNA “n’avait pas connaissance au préalable de l’action de Gérard (Houa, NDLR) et désapprouve ce qu’il a tenté de faire”.

Le redressement judiciaire, qui doit être accepté par la justice, gèle le passif existant à l’ouverture de la procédure, pendant une période d’observation qui peut durer jusqu’à 18 mois. Elle doit permettre à l’entreprise de présenter un plan de continuation de ses activités avec un réaménagement de son endettement.

Aigle Azur, fondée en 1946 et dont les liaisons avec l’Algérie représentent 50% à 60% de l’activité, emploie 350 de ses salariés en Algérie. Elle dispose d’une flotte de 11 avions et a transporté 1,88 million de passagers en 2018. Elle a réalisé un chiffre d’affaires de 300 millions d’euros en 2018 mais “perd de l’argent depuis 2012”, selon M. Yvelin.